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Le syndrome de Diogène : pathologie ou manie ?

Le Docteur Jean-Claude Montfort est un médecin neuro-psycho-gériatre spécialisé dans le syndrome de Diogène. Il le définit non pas comme une pathologie, mais comme un ensemble de comportements ou de symptômes allant à rebours des conventions sociales et pouvant conduire à des conditions de vie négligées, voire insalubres.

Une référence à la philosophie grecque

Le nom « Syndrome de Diogène », adopté en 1975, tire son origine de Diogène de Sinope, philosophe grec légendaire du IVe siècle av. J.-C., et l’un des plus célèbres élèves de l’école cynique d’Antisthène. D’après certains écrits, Platon le considérait comme « un Socrate devenu fou ».

Diogène vivait dans une amphore et s’accommodait du plus grand dénuement, s’affranchissant des conventions de la société. C’est en référence à ce mode de vie que des chercheurs ont qualifié certains comportements chez leurs patients de syndrome de Diogène.

Une forme de trouble comportemental

Le syndrome de Diogène est un dérèglement psychologique et comportemental. Il regroupe différentes attitudes comme une tendance à l’accumulation d’objets (la syllogomanie), une carence d’hygiène corporelle et domestique et, dans la plupart des cas, un isolement social quasi-total et assumé.

Les personnes atteintes du syndrome de Diogène présentent de fortes dispositions à une vie insalubre et une dégradation de leur logement.

Ce syndrome, qui affecte essentiellement les personnes âgées, survient souvent après un choc psychologique ou après une rupture existentielle ou sociale (décès d’un proche, deuil, perte d’emploi, d’un statut social, etc).

Le syndrome de Diogène se manifeste sous des formes diverses

Plusieurs symptômes permettent de reconnaître le syndrome de Diogène :

  • L’incurie, ou négligence parfois extrême de l’hygiène corporelle et domestique
  • La syllogomanie, ou entassement d’objets hétéroclites : ce capharnaüm peut entraîner une incapacité totale d’entretenir ou même de faire entretenir son logement.
  • Une absence de honte et de dégoût vis-à-vis de ces conditions insalubres.
  • Une existence recluse dans le plus grand isolement social.
  • Une personnalité prémorbide voire schizophrène.

« Les personnes atteintes du syndrome de Diogène ne demandent jamais rien alors qu’elles auraient besoin de tout » Dr Jean-Claude Monfort

Toutes les classes sociales peuvent être affectées par le syndrome de Diogène.

Les personnes âgées sont le plus susceptibles d’être touchées. Les personnes qui vivent seules, entre 70 à 80 ans, le plus souvent des femmes, sont les victimes les plus fréquentes.

D’après le Dr Jean-Claude Monfort, « le signe d’identification le plus fréquent est que les personnes atteintes du syndrome de Diogène ne demandent jamais rien alors qu’elles auraient besoin de tout ».

Solitude totale, absence de recours à l’extérieur, rendent difficile le repérage des cas avérés. Souvent, le voisinage ou la famille sont à l’origine du signalement de la personne.

Une personne atteinte du syndrome de Diogène entretient un rapport extrême dans sa relation aux autres, au corps ou aux objets 

  • La relation aux autres : elle peut se manifester comme un rejet total d’autrui (Diogène reclus à domicile), entraînant un grand isolement social, la personne se coupant de sa famille et ses proches. A l’inverse, la personne peut faire preuve d’une grande prévenance envers les autres (Diogène philanthrope).
  • La relation au corps : elle se traduit par une incurie totale, « Diogène sale », ou par une extrême méticulosité, « Diogène propre ». Dans ces 2 cas, le comportement s’applique aussi bien à l’hygiène corporelle qu’au logement. Quel que soit l’état de son lieu de vie, la personne affiche une attitude parfaitement détachée.
  • La relation aux objets : la personne atteinte du syndrome de Diogène peut passer d’un logement totalement encombré (Diogène de Clark) à un logement entièrement vide (Diogène de Sinope).

Pour les personnes atteintes du syndrome et leurs proches, des risques inhérents à l’accumulation d’objets peuvent se présenter

  • Les risques biologiques : accumulation de poussière, de bactéries et moisissure, invasion d’insectes ou d’animaux nuisibles
  • Les risques chimiques liés à la toxicologie environnementale : l’intoxication au CO2, l’alimentation avariée, l’eau souillée, les produits de nettoyage, la perte de tolérance aux produits chimiques…
  • Risques d’inondations, suite à l’obstruction des canalisations
  • Les risques d’incendie liés à l’amassement des papiers ainsi que des autres produits combustibles
  • Allergies, intoxications ou infections

Face à ce syndrome, il est important de poser les bonnes questions

Face à de telles situations, et avant d’envisager une quelconque action thérapeutique, il est d’abord important de poser les bonnes questions. S’agit-il d’un réel cas pathologique ou seulement d’un choix de vie, à l’image de Diogène de Sinope ? L’intervention d’un médecin est-elle nécessaire ? Est-elle véritablement justifiée ?

Une fois que le syndrome est identifié, que des contacts avec la personne atteinte ont été noués, il est important de faire sortir la personne de son environnement dégradé et insalubre pour faire procéder à un nettoyage complet par des professionnels.

Alors, un suivi personnalisé peut être mis en place. Une démarche longue et compliquée…