Qu’est-ce que l’analyse des pratiques professionnelles (APP) ?
L’analyse des pratiques est un outil qui permet aux professionnels d’échanger collectivement sur leur activité afin de trouver des solutions aux problématiques qu’ils rencontrent quotidiennement. L’analyse des pratiques professionnelles se développe de plus en plus dans les secteurs où l’aspect relationnel est prédominant. Les intervenants du secteur social et médico-social sont donc particulièrement concernés (travailleurs sociaux, managers, etc.).
Voyons en détail en quoi consiste cette technique et comment se déroulent les séances au sein des groupes d’analyse de pratiques.
L’analyse des pratiques professionnelles s’inscrit dans une démarche collective
Les professionnels d’une même structure se regroupent au sein d’un groupe d’analyse des pratiques (GAP). L’initiative peut être prise individuellement ou provenir de l’établissement, mais il s’agit dans tous les cas d’un travail collectif. Le groupe est animé par un intervenant formé à l’analyse des pratiques.
Les participants présentent des situations professionnelles concrètes, des difficultés qu’ils vivent ou ont vécues, et cherchent ensemble à mettre en place des actions d’amélioration. Il s’agit avant tout d’un lieu de dialogue constructif où la prise en compte et l’aide du professionnel prédominent.
L’APP poursuit plusieurs objectifs
Grâce à la pratique réflexive, qui consiste à analyser le vécu professionnel pour dégager des amorces de solutions, le GAP poursuit plusieurs objectifs :
Aider le professionnel qui affronte des situations complexes
Dans le secteur social et médico-social, les intervenants accompagnent des personnes en situation de grande vulnérabilité. Que ce soit dans la protection de l’enfance, l’accompagnement des personnes âgées, la précarité, le handicap, etc., les prises en charge des usagers sont bien souvent compliquées à mettre en place, et la pression est quotidienne. À noter que l’analyse des pratiques professionnelles est utile pour le travail social, mais aussi pour le management.
Participer à un groupe d’analyse des pratiques permet de lutter contre l’épuisement professionnel, qui peut aboutir à une altération de la santé mentale et physique.
Le travail effectué au sein de ces groupes permet de prendre du recul par rapport à des évènements qui génèrent des émotions fortes (accompagnement d’une personne en fin de vie, gestion du deuil, etc.). Dans ces situations, le professionnel peut ressentir une grande solitude. Sa participation au GAP lui donne l’opportunité d’être entouré par les membres du groupe, de se libérer en exposant ses difficultés, ses éventuels ressentiments, et de retrouver une qualité de vie au travail. Des ébauches de solutions peuvent alors voir le jour, et le plaisir d’exercer son métier est retrouvé.
Mettre en commun les compétences de chacun pour améliorer le travail d’équipe et enrichir sa pratique
Les professionnels effectuent bien souvent leurs missions dans l’urgence (gestion de comportements violents, nécessité de trouver au plus vite un logement pour une famille en situation de grande précarité, etc.). Ils manquent de temps pour faire des pauses et réfléchir à leurs pratiques, ainsi qu’au sens de leur activité.
Les groupes d’analyse des pratiques professionnelles leur donnent l’occasion d’échanger sur les manières de faire de chacun face à des situations données, et de révéler leur potentiel.
Le partage des connaissances et des compétences leur permet de réfléchir à leur propre vécu professionnel et de perfectionner leur pratique. Les participants peuvent également être amenés à se remettre en question afin d’améliorer progressivement leur accompagnement. Ils s’enrichissent des discussions, des ressources de leurs collaborateurs, et peuvent ainsi progresser professionnellement.
Le travail en commun fait ressortir tout le positif des différentes missions exercées, et redonne confiance et motivation. Au travers des expériences de chacun , les professionnels se rendent compte que malgré les difficultés, ils parviennent à mettre en place des actions positives.
En mettant en avant leur parcours et les difficultés rencontrées, les participants apprennent également à s’entraider, se sentent plus impliqués, ce qui a pour effet de développer la coopération au sein du groupe. Cette solidarité permet de consolider l’identité professionnelle et d’accroître la cohésion d’équipe, car les participants se rendent compte qu’ils partagent des valeurs identiques.
Cette cohésion est particulièrement importante dans le secteur social et médico-social. En effet, les équipes sont pluridisciplinaires, ce qui peut entraîner des conflits de valeurs, des points de vue différents, même si l’objectif est semblable : accompagner des personnes vulnérables
Produire des effets positifs sur les publics accueillis
Si nous prenons l’exemple du secteur de la petite enfance, nous nous rendons compte que, bien souvent, la souffrance d’un professionnel se répercute sur l’attitude des enfants. Ces derniers la ressentent, et cela peut aggraver leur comportement (agressivité, violence, etc.). Un professionnel qui prend soin de lui et analyse régulièrement sa pratique propose un accompagnement plus qualitatif. Les solutions qu’il parvient à dégager lors des GAP permettent à la fois d’avoir des effets bénéfiques sur lui et sa structure, mais aussi sur les personnes accueillies.
Le groupe d’analyse des pratiques comporte plusieurs étapes
Les séances d’analyse se déroulent généralement de la façon qui suit :
L’animateur du groupe énonce les modalités de fonctionnement de la séance
Pour que le GAP fonctionne efficacement, les membres doivent respecter quelques principes : avoir un comportement bienveillant, ne pas juger les autres participants et les respecter, être à l’écoute, garder les informations confidentielles, etc. Dans le cas contraire, les individus ne parviendront pas à se confier, n’arriveront pas à collaborer, car ils ne se sentiront pas en confiance. Chacun doit pouvoir évoluer dans un cadre rassurant. C’est pourquoi chaque séance débute généralement par un rappel de ces règles de fonctionnement du groupe.
Chacun est ensuite invité à présenter son activité ainsi que ses collaborateurs afin que l’animateur puisse se faire une idée de la façon dont les membres communiquent.
Un participant expose une situation problématique
Un membre du groupe explique une situation complexe qu’il a vécue. Avec l’aide de l’animateur, l’ensemble des participants va s’attacher à comprendre le problème réel de la personne qui a décrit l’évènement.
Chacun peut poser ses questions afin d’obtenir les éclaircissements nécessaires. Les questionnements du groupe ainsi que les échanges de pratiques permettent de faire émerger des éléments nouveaux pouvant enrichir l’analyse.
Cette posture réflexive aboutit à l’élaboration d’hypothèses, puis à la proposition de pistes d’amélioration
Le GAP ébauche une solution
Les membres du groupe participent collectivement à l’élaboration de solutions. La personne ayant exposé la situation problématique a la possibilité d’accepter ou non les axes de progression proposés par ses collaborateurs.
À la fin de la démarche, chacun doit repartir gagnant, c’est-à-dire que les participants doivent avoir le sentiment d’avoir des pistes de solutions, et surtout d’avoir avancé dans leur cheminement même s’il n’ont pas trouvé toutes les réponses à leurs questions.
L’animateur joue un rôle essentiel dans le groupe d’analyse des pratiques
L’intervenant en analyse des pratiques professionnelles doit faciliter le travail d’analyse au sein du groupe, il joue donc un rôle important.
Il instaure la confiance
Les membres du groupe doivent sentir la présence de l’animateur, cela crée un sentiment de sécurité.
Si un participant ne se sent pas rassuré, il n’osera pas s’exprimer, dévoiler ce qui le préoccupe. L’écoute active, l’humilité, la bienveillance, etc., sont des qualités dont l’animateur doit faire preuve pour que chacun ait envie de participer activement. Il est préférable qu’il n’appartienne pas à la structure afin de préserver la vie personnelle des personnes présentes.
Il suscite l’intelligence collective
L’animateur doit faire en sorte que le groupe utilise au mieux sa réflexion et ses capacités pour amorcer des solutions grâce à la coopération.
Il reformule les propos des participants
L’animateur ne doit pas interpréter les dires d’un professionnel en fonction de sa propre vision du monde. La reformulation lui permet ainsi de garantir sa neutralité dans les échanges. Le professionnel doit se sentir compris pour envisager d’engager un travail.
Il décontextualise la situation analysée dans le GAP
L’intervenant propose d’étudier le problème sous des angles distincts. Cela permet d’analyser autrement une situation donnée, et de changer son point de vue en prenant de la distance.
Il laisse les participants trouver la solution au problème exposé
Ce sont les membres du groupe qui doivent trouver les réponses à la problématique rencontrée. L’animateur les aide à se questionner, mais il doit leur faire comprendre que ce sont eux qui détiennent la solution à leurs difficultés. Il doit simplement faciliter le dialogue et l’accès à ces pistes d’amélioration.
Pour réussir au mieux sa mission, l’intervenant doit se former à l’analyse des pratiques professionnelles.
L’animation d’un groupe d’analyse des pratiques requiert une formation solide
Nous l’avons vu, l’animateur a une responsabilité importante dans la réussite des analyses de pratique professionnelle. Il doit donc travailler sur sa capacité à aider les autres, à être à l’écoute (l’empathie), à faire preuve de neutralité, etc. Il doit apprendre à laisser les participants trouver leurs propres solutions et ne pas imposer les siennes. Il a aussi besoin de s’approprier la méthode tout en réfléchissant à ce qu’il peut apporter de plus aux professionnels qu’il va être amené à encadrer (sa touche personnelle).
Chez Epsilon Melia, nous avons créé une formation certifiante pour apprendre aux professionnels à animer des groupes d’analyse des pratiques dans le secteur social et médico-social :
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nous apportons des outils théoriques et pratiques qu’ils peuvent mettre en place immédiatement après la formation ;
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nous les sensibilisons à l’approche systémique de l’analyse des pratiques sans pour autant oublier les apports d’autres écoles ;
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nous les aidons à instaurer la confiance au sein du groupe, à renforcer leur capacité d’écoute, de reformulation ;
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Notre formation comprend également des mises en situation concernant l’animation de GAP.
Nous avons déjà formé plus de 170 animateurs de groupes d’analyse de la pratique.
Nous proposons également aux structures sociales et médico-sociales d’animer des groupes d’analyse des pratiques professionnelles pour leurs cadres, leurs équipes et le personnel travaillant dans les crèches.
Notre organisme de formation est certifié Datadock et Qualiopi afin de vous garantir la qualité de nos programmes.
4 professionnels du social ont testé l’analyse de la pratique et témoignent
Françoise H., responsable des étudiants en éducation spécialisée à la protection judiciaire de la jeunesse
Françoise H. souhaitait permettre aux étudiants dont elle s’occupe de travailler sur la « dimension subjective » de leur activité : qu’est-ce qui les mobilise dans une situation de travail spécifique ? Que peuvent-ils en dire ? Comment s’en distancier ?
« Nous cherchions des psychologues cliniciens qui viennent de l’extérieur pour qu’ils ne soient pas pris dans des enjeux institutionnels », précise Françoise H.
Trois groupes d’analyse de la pratique ont donc été mis en place pour les étudiants et bien que les échanges entre ces jeunes et les intervenants restent confidentiels, Françoise a assuré qu’elle n’a obtenu que des retours positifs de la part de ses étudiants !
« Ils ont pu travailler sur leurs affects en situation de travail, dans un cadre sécurisant », a-t-elle confié.
Béatrice A., directrice du centre Maurice Coutrot (93), établissement d’enseignement spécialisé et de rééducation pour handicapés moteurs
Pour Béatrice A., l’enjeu de l’analyse de la pratique professionnelle était de « clarifier les missions des professionnels » de son établissement pour « repositionner le jeune au centre de leurs préoccupations. »
Pour la directrice, l’efficacité de cette méthode sur le travail de ses équipes a été évidente : « C’est aussi un temps vraiment apprécié des professionnels, car ils ont besoin de prendre du recul par rapport au quotidien de leur travail », a-t-elle conclu.
Véronique M., Responsable de la Permanence ministérielle des interventions sociales
Véronique M. a participé il y a quelque temps à un groupe d’analyse de la pratique avec les quatre assistantes sociales de son service qui, selon elle, n’avaient pas de place bien définie dans l’institution dans laquelle elles se trouvaient.
« Nous avions besoin de lieux pour prendre de la distance sur l’institution et les situations rencontrées », a indiqué la responsable. « Ce travail permet de se positionner et d’évoquer les questions relationnelles en présence d’une personne qui n’est pas partie prenante. » Une prise de recul nécessaire et bénéfique pour ces assistantes sociales qui ont également appris de petites techniques pour mieux gérer certaines situations délicates liées à leur métier : savoir affronter les entretiens téléphoniques difficiles, par exemple. Aujourd’hui, elles savent qu’elles peuvent mieux écouter leur interlocuteur afin de désamorcer plus facilement une situation.
Finalement, leur travail est plus efficace et elles se sentent mieux dans leurs fonctions grâce à l’analyse des pratiques professionnelles.
Blandine E., chef de service à l’association Arfog-Lafayette qui intervient dans l’insertion sociale
En tant que cadre, Blandine E. a participé à l’un des deux groupes d’analyse de la pratique mis en place pour les cadres de son association. Pour elle, c’est une véritable opportunité de partager les expériences entre pairs, de débattre et de créer un nouvel élan bénéfique pour tous.
« Ce qui est intéressant, c’est que l’animateur connaît autant le terrain que la gouvernance, en plus d’avoir une formation en psychologie », a-t-elle remarqué. Cette chef de service estime crucial de créer une bonne dynamique dans ces groupes pour que chacun accepte de se livrer un peu, pour enrichir les débats et faire en sorte que chacun ressorte avec une nouvelle idée, une nouvelle opinion de son métier et surtout une nouvelle approche dans la façon de le pratiquer.
Enfin, le partage d’expériences qui caractérise un groupe d’analyse de la pratique est « ce qui aide à relativiser devant la charge de travail et les difficultés qu’elle et ses semblables peuvent rencontrer. On se sent moins seul », a-t-elle conclu.
Vous souhaitez avoir des renseignements complémentaires sur notre formation certifiante destinée à l’animation de groupes d’analyse des pratiques ? Nous vous invitons à nous contacter.